avril 14, 2020
Lorsque l’on pose la question "Qui produit du contenu ici ?’’ toutes les mains se lèvent dans la salle. Ces mains appartiennent toutes à la même entreprise: gestionnaires médias sociaux, responsables de la marque, rédacteurs numériques, responsables de l’infolettre, traducteurs…
Le nombre d’acteurs de la chaîne de production du contenu a grandi de façon aussi exponentielle que désorganisée dans de nombreuses entreprises. Et ce chaos se traduit par un océan de contenus disponibles en ligne. En janvier 2019, on comptait presque 2 milliards de sites Web et on évaluait à 4 millions le nombre d’articles de blogues publiés par jour.
Alors que les formats de contenus évoluent, l’objectif reste le même: répondre aux requêtes internautes. Google les estime à plus de 5 milliards par jour, dont 15% sont nouvelles (source de ces statistiques).
Face à la profusion et la diversité des contenus, il est vital pour une entreprise de contrôler sa production. Comment assurer de la cohérence entre une publication Facebook et une page de produit ? Comment offrir une expérience optimale et unifiée à un internaute susceptible d’arriver par n’importe quel canal ? Qui sont les garants de la ligne éditoriale ? Sont-ils différents de ceux qui créent les contenus ? Qui intervient à quel moment de la chaîne de production ? Qui est imputable et à quel niveau (respect des échéances, qualité du contenu, suivi de la performance) ? Autant de questions auxquelles la gouvernance éditoriale répond.
La gouvernance éditoriale repose sur la maîtrise des processus de production
La gouvernance éditoriale repose sur une parfaite connaissance et le contrôle:
- des processus de production de contenus
- des flots de collaboration
- du rôle et du périmètre de chaque acteur et de chaque équipe
Cet exercice est inévitable pour toute entreprise qui souhaite uniformiser et optimiser sa production, et plus largement sa stratégie de contenu. Cette phase d’audit comprend une dimension politique importante qui peut être un frein à la neutralité du rapport.
Cela requiert souvent un prestataire externe pour une parfaite impartialité dans le recueil et la structuration des informations. Les méthodologies d’audit peuvent varier selon la nature de l’entreprise et son besoin, mais certaines activités restent en tout temps pertinentes:
- Déterminer les dimensions à auditer (flots de collaboration, outils et technologies utilisés, performance et mesure etc.).
- Réaliser les entrevues des personnes clés sur les sujets clés pour constater de la situation actuelle (un SWOT peut être un bon cadre pour récolter l’information)
- Cartographier la chaîne de production du contenu, de l’élaboration de la stratégie à la mesure de la performance du contenu produit avec:
- Les acteurs impliqués à chaque étape et leur rôle ( décisionnaire, influenceur …).
- Les flots de collaboration.
- Les irritants et les lacunes.
- Les dédoublements de responsabilités.
- Les outils et technologies utilisés.
Maîtriser les méthodologies et processus de travail est une première étape de la gouvernance éditoriale. Elle permet de mettre en lumière ce qui fonctionne et les lacunes actuelles. La seconde consiste à mesurer la qualité de cette production.
L’importance de l’imputabilité dans la stratégie de contenu
Entre les différentes équipes, le travail en silo peut arriver facilement. Chacun travaille dans son périmètre, avec ses propres objectifs et contraintes, sans visibilité globale. Il peut en résulter des prises de décisions contradictoires nuisibles à l’efficacité du projet.
C’est souvent lors de l’audit que le problème de dédoublement de responsabilités ressort: plusieurs équipes sont responsables des mêmes tâches. Il est important à cette étape de régler ces redondances qui nuisent à l’optimisation des processus.
Pour cela, l’organisation d’ateliers avec les gestionnaires et décisionnaires s’avère pertinente. Là encore, l’animation par un prestataire externe reste judicieuse, la dimension politique étant importante. Il est naturel pour un gestionnaire, de manière à la fois consciente et inconsciente, de vouloir étendre ou garder intact son périmètre décisionnel. Alors que la mise à plat des flots de collaboration entraînera probablement des débats sur l'étendue des responsabilités de chaque équipe, l'animation par un prestataire externe peut s'avérer un choix judicieux pour faciliter les échanges harmonieux et revenir à l'essentiel: le client.Si vous souhaitez vous lancer, voici quelques clés pour animer un atelier en mode DesignThinking.
La théorie des systèmes pourra être utilisée pour décloisonner les équipes et pousser les managers à dépasser leurs intérêts propres. Celle-ci stipule que le tout est supérieur à la somme des composantes. En résumé, lorsque les équipes travaillent ensemble, elles apportent plus de valeur qu’en étant simplement additionnées.
Afin de trancher sur les rôles et responsabilités de chacun, les gestionnaires doivent maîtriser les niveaux de compétences de leurs services. Est-ce que les rédacteurs Web ont de bonnes compétences SEO ? Est-ce que les stratèges de contenu maîtrisent les outils de mesure de la performance ? Chaque gestionnaire devrait faire l’exercice de remplir et faire remplir une grille de compétences à chaque membre de son équipe afin de pouvoir le situer et évaluer plus globalement la maturité de son équipe sur les différentes compétences clés liées à son expertise.
Définir le mandat, les responsabilités et l’imputabilité de chaque équipe permet de servir une stratégie de contenu commune par le biais d’une organisation éditoriale efficace. Cela consiste à structurer les processus de production de contenus pour alimenter les différents canaux de communication selon un calendrier éditorial défini. Il devient alors plus facile de mettre en lien les ressources pertinentes au bon moment, comme par exemple l’expert SEO avec le rédacteur Web, ou encore le gestionnaire de communauté avec l’agence en charge des campagnes publicitaires.
Quel modèle de gouvernance éditoriale ?
Au regard des différentes études sur le sujet, il existe de nombreux modèles de gouvernance. La gouvernance centralisée, par exemple, induit la création de deux groupes: un comité de direction éditoriale, qui décide de la stratégie et de la planification, et un groupe de travail éditorial en charge de l’exécution. Ce second groupe peut être au sein d’une seule et même équipe, ou bien plusieurs, à l’interne et à l’externe. L’important est que toutes les entités relèvent d’un même comité de direction éditoriale et répondent à des objectifs communs.
À l’inverse, le modèle de gouvernance décentralisée donne à chaque entité la responsabilité de la planification et de l’exécution de la production de contenu dans les limites de leur mandat.
Il existe de nombreux modèles de gouvernance, reste à trouver celui qui correspond le mieux à votre entreprise. Une fois le modèle trouvé, sa mise en place s’avère un tout autre défi.
Un langage et des processus communs à toutes les équipes de contenu
Qui n’a jamais entendu "Ah mais tu as rédigé l’article comme ça ? C’est dommage on avait un gabarit, mais il faudrait que je le retrouve..." ? Confluence, Dropbox, Google Drive, Content Full… Les outils de stockage de documentation sont aussi variés que l’utilisation que chacun en fait. Et plus l’entreprise est grande, plus la documentation est un enjeu. Chaque département agit souvent de façon organique et se constitue sa propre documentation avec son propre vocabulaire, souvent opaque pour un étranger au service.
"Selon le Content Marketing Institute, seulement un tiers des marketers dans le secteur BtoB ont une stratégie de contenu documentée et estiment que leur approche est efficace."
Pour que les équipes, aussi variées soient-elles, puissent travailler ensemble, il est essentiel qu’elles adoptent un langage, des méthodes et des outils communs. Quelles sont les valeurs de la marque ? Quel ton utiliser sur quel canal de communication ? Qu’entend-on par stratégie de contenu, stratégie éditoriale, ligne éditoriale ?
Il est impératif de documenter les normes éditoriales à travers des documents tels qu’une charte éditoriale, un guide de normes rédactionnelles, une charte graphique etc. Ces documents doivent être connus de tous et disponibles en tout temps. Ils doivent surtout être à jour car les évolutions, notamment numériques, sont fréquentes. Le plus simple est de désigner les garants de ces normes qui seront en charge de les faire respecter et de les faire évoluer.
En plus de ces bases de travail communes, la production de contenu doit avant servir des objectifs d’affaires clairs pour toute l’organisation. Ces KPI vont guider la production et le suivi de la performance du contenu. Pour cela, les outils de collecte de données se révèlent être des outils à intégrer dans le quotidien des équipes de contenu. Il est possible de proposer du contenu personnalisé selon une segmentation démographique, géographique ou encore comportementale.
La culture du data driven vient ainsi nourrir la stratégie de contenu et complexifier la gouvernance éditoriale en ajoutant encore de nouveaux acteurs et de nouvelles dimensions. Si celle-ci est bien intégrée dans les équipes, elle aura pour résultat une meilleure productivité et favorisera l’atteinte des objectifs.